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Bannia

 

Ce jeudi 19 janvier, on fêtait la Theophania à Kiev : l’équivalent de l’épiphanie catholique. Il s’agit de se remémorer le baptême du Christ dans le Jourdain. Mais aux premiers jours de 2012, c’est davantage l’occasion pour les jeunes kiéviens  de perpétuer une tradition  que de célébrer une fête biblique.

Après avoir longtemps longer les bords du Dniepr et s’être éloigné progressivement du centre de Kiev, on entre dans l’enceinte d’un hôtel, désolément désert à cette période de l’année. La bâtisse donne sur les rives imposantes de la rivière qui saigne la ville de Kiev en deux. À ses côtés, on aperçoit les vestiges de camps de vacances communistes, des jeux d’enfants désarticulés et rouillés et des bâtiments en ruine, le souvenir d’une époque révolue. Devant l’hôtel se trouve le bannia, loin de ressembler à un cabanon, c’est une grande maison posée dans la neige à une trentaine de mètres de la rive. On se demande à quoi ressemblera l’intérieur. Après s’être allégé de ses nombreuses épaisseurs de vêtements, on accède à un couloir de bois : à gauche se trouve une salle de détente, des bancs et des canapés en cuir encerclent une longue table garnie de thé, d’eau et de biscuits ; à droite du couloir, on accède à la salle du bain, une petite piscine carrée, dont on comprend rapidement qu’il vaut mieux éviter de s’y plonger, fait face aux douches. Après s’être lavé, on se déchausse et entre dans le bannia, l’équivalent du sauna français. Trois étages en bois se succèdent, encombrés d’ukrainiens suants, silencieux, respirant la tranquillité vaporeuse de ce lieu indissociable de la culture slave. Des huiles essentielles odorent le bannia, on s’allonge pour profiter d’un massage à la russe : avec des branches recouvertes de lourdes feuilles imbibées d’eau. Au sortir du bannia, on pousse une seconde porte qui donne sur le Dniepr. Le corps fume comme on ne l’aurait jamais soupçonné et curieusement le contact de la neige que l’on se frotte contre le corps n’est pas désagréable. La majesté du fleuve recouvert d’une épaisse couche de glace, le silence des rives endormies par la neige et le vent glacial qui refroidit rapidement ces corps brûlants, remplissent ce lieu d’une étrange et naturelle sérénité. Puis, des cris, des corps qui courent vers le rivage et, s’en réfléchir, plongent leurs corps brûlants au milieu du trou creusé dans la glace pour accéder au fleuve. L’eau, ce jour là est bénite,  un pope probablement situé sur l’autre rivage aura consciencieusement accomplit chaque geste du rite orthodoxe : creuser la glace en forme de croix puis y plonger à trois reprises la croix en appelant l’Esprit Saint. Et, sortant de l’eau bénis, les kiéviens courent nus dans la neige afin de rejoindre au plus vite le bannia et boire du thé pour clore slavement la cérémonie et retourner une dernière fois au bannia.